Dans le secteur du travail temporaire, l’abréviation « TT » désigne simplement « Travail Temporaire », et une « fin de mission TT » correspond donc à la conclusion d’un contrat d’intérim. Cette terminologie apparaît fréquemment sur les attestations Pôle emploi et les documents administratifs liés à l’emploi temporaire. Comprendre les implications juridiques et financières d’une fin de mission temporaire s’avère essentiel pour les salariés intérimaires, qui représentent aujourd’hui près de 2,8 millions de personnes en France. Cette situation contractuelle particulière génère des droits spécifiques, notamment en matière d’indemnisation et de protection sociale, qu’il convient de maîtriser pour optimiser ses droits professionnels.

Définition juridique et contractuelle de la fin de mission « TT »

Cadre légal du travail temporaire selon le code du travail français

Le travail temporaire s’inscrit dans un cadre juridique précis défini par les articles L1251-1 et suivants du Code du travail. Cette relation triangulaire implique trois acteurs distincts : l’entreprise de travail temporaire (ETT), l’entreprise utilisatrice et le salarié intérimaire. La fin de mission TT marque la rupture du lien contractuel entre l’ETT et le salarié, sans préavis ni procédure de licenciement classique. Cette spécificité contractuelle permet une flexibilité accrue dans la gestion des ressources humaines, tout en offrant des garanties particulières au travailleur temporaire.

La durée maximale d’une mission d’intérim varie selon le motif de recours, oscillant généralement entre 18 mois pour les motifs courants et 24 mois dans certains cas spécifiques comme les missions à l’étranger. Les statistiques du secteur révèlent qu’environ 65% des missions d’intérim durent moins d’une semaine, illustrant la nature ponctuelle de ce type d’emploi. Cette brièveté explique en partie l’existence d’indemnités compensatrices destinées à pallier la précarité inhérente au statut d’intérimaire.

Distinction entre fin de mission normale et rupture anticipée

La fin de mission normale intervient à l’échéance prévue au contrat ou lors de la réalisation complète de l’objet pour lequel la mission a été conclue. Dans ce contexte, le salarié bénéficie de l’intégralité de ses droits, notamment l’indemnité de fin de mission et l’indemnité compensatrice de congés payés. Cette situation représente environ 80% des fins de mission dans le secteur du travail temporaire, selon les données de l’Observatoire de l’Intérim et du Recrutement.

En revanche, la rupture anticipée peut survenir à l’initiative de différents acteurs et selon diverses modalités. Lorsque l’entreprise utilisatrice met fin prématurément à la mission, l’ETT doit proposer une nouvelle mission équivalente au salarié dans un délai de trois jours ouvrables. Si le salarié rompt son contrat de sa propre initiative, il perd généralement le droit à l’indemnité de fin de mission, sauf s’il est embauché en CDI par l’entreprise utilisatrice. Cette distinction revêt une importance cruciale pour le calcul des droits du travailleur temporaire.

Obligations légales de l’entreprise de travail temporaire (ETT)

L’ETT assume plusieurs obligations légales lors de la fin d’une mission temporaire. Elle doit établir et remettre au salarié un certificat de travail mentionnant la qualification professionnelle, la durée de la mission et attestant que le salarié est libre de tout engagement. Cette obligation s’accompagne de la remise d’un bulletin de salaire détaillé incluant l’ensemble des éléments de rémunération et les indemnités dues.

L’entreprise de travail temporaire doit également procéder à la déclaration sociale nominative (DSN) dans les délais réglementaires et établir l’attestation Pôle emploi nécessaire à l’ouverture des droits au chômage. Ces démarches administratives conditionnent l’accès du salarié à ses droits sociaux et doivent être effectuées avec rigueur. Les ETT qui manqueraient à ces obligations s’exposent à des sanctions administratives et pénales, ainsi qu’à des demandes de dommages-intérêts de la part des salariés lésés.

Droits du salarié intérimaire en fin de contrat

Le salarié intérimaire dispose de droits spécifiques en fin de mission, dont le principal est l’indemnité de fin de mission équivalente à 10% de sa rémunération totale brute. Cette indemnité, qualifiée juridiquement de salaire, vise à compenser la précarité de la situation du travailleur temporaire. Elle s’ajoute à l’indemnité compensatrice de congés payés, également fixée à 10% de la rémunération totale brute, incluant l’indemnité de fin de mission.

Le travailleur temporaire conserve également le droit de refuser une nouvelle mission proposée par l’ETT sans que cela puisse être considéré comme un abandon de poste. Cette protection juridique permet au salarié de préserver sa liberté contractuelle tout en bénéficiant des avantages du statut d’intérimaire. En cas de litige sur le versement des indemnités ou les conditions de fin de mission, le salarié dispose d’un recours devant le conseil de prud’hommes dans un délai de trois ans suivant la fin du contrat.

Modalités de calcul de l’indemnité de fin de mission

Taux légal de 10% appliqué à la rémunération totale brute

L’indemnité de fin de mission (IFM) représente un complément de salaire destiné à compenser la précarité inhérente au travail temporaire. Son taux, fixé à 10% par l’accord interprofessionnel du 24 mars 1990 et confirmé par l’article L1251-32 du Code du travail, s’applique à la totalité de la rémunération brute perçue pendant la mission. Cette indemnité constitue un élément distinctif majeur du travail temporaire par rapport aux autres formes d’emploi précaire.

Le calcul s’effectue sur la base de la rémunération totale brute, incluant le salaire de base, les heures supplémentaires, les majorations diverses et l’ensemble des éléments constitutifs du salaire. Pour une mission de 100 heures rémunérées au SMIC horaire (11,27 € en 2024), l’indemnité de fin de mission s’élèverait ainsi à 112,70 € bruts. Cette méthode de calcul garantit une proportionnalité entre la durée de la mission et l’indemnisation de la précarité.

Base de calcul incluant primes et avantages en nature

La base de calcul de l’indemnité de fin de mission englobe l’intégralité des éléments de rémunération versés pendant la mission. Cela comprend les primes de vacances, les primes de fin d’année, les treizièmes mois éventuels, ainsi que les avantages en nature évalués forfaitairement. Cette approche globale vise à éviter toute minoration artificielle de l’indemnité par l’exclusion d’éléments de rémunération.

Les majorations pour travail de nuit, du dimanche ou des jours fériés entrent également dans cette base de calcul. En revanche, certains éléments sont explicitement exclus, comme les indemnités de remboursement de frais professionnels ou les indemnités journalières de Sécurité sociale en cas d’arrêt maladie. Cette distinction permet de circonscrire précisément les éléments relevant de la rémunération du travail effectué. Les entreprises de travail temporaire doivent veiller à appliquer ces règles avec précision pour éviter tout redressement ultérieur.

Cas d’exonération de l’indemnité compensatrice

L’indemnité de fin de mission n’est pas due dans plusieurs situations spécifiques énumérées par l’article L1251-33 du Code du travail. L’embauche immédiate en CDI par l’entreprise utilisatrice constitue le cas d’exonération le plus fréquent, concernant environ 12% des fins de mission selon les statistiques sectorielles. Cette exonération se justifie par la continuité de l’emploi qui efface la situation de précarité.

La rupture anticipée du contrat à l’initiative du salarié, sa faute grave ou un cas de force majeure entraînent également la suppression de l’indemnité de fin de mission.

Les missions à caractère saisonnier ou les contrats de mission-formation peuvent également faire l’objet d’une exonération si un accord collectif étendu le prévoit. Cette possibilité, utilisée dans certains secteurs comme l’agriculture ou le tourisme, permet d’adapter le régime indemnitaire aux spécificités sectorielles. Toutefois, ces exonérations restent strictement encadrées et ne peuvent résulter que de dispositions légales ou conventionnelles explicites.

Impact des congés payés sur le montant final

L’indemnité compensatrice de congés payés (ICCP) se calcule également au taux de 10% mais sur une base incluant l’indemnité de fin de mission. Cette particularité du calcul génère un effet cumulatif qui porte le taux global d’indemnisation à 21% de la rémunération brute initiale. Pour reprendre l’exemple précédent d’une mission de 100 heures au SMIC, l’ICCP s’élèverait à 123,97 € bruts (1127 € + 112,70 € × 10%).

Cette méthode de calcul en cascade reflète la logique juridique selon laquelle l’indemnité de fin de mission constitue un élément de rémunération ouvrant droit aux congés payés. Le montant total des indemnités représente ainsi une part significative de la rémunération globale , pouvant atteindre plus de 20% pour les missions courtes. Cette spécificité du travail temporaire explique en partie l’attrait de ce secteur pour certains profils de travailleurs recherchant une rémunération optimisée sur des périodes courtes.

Procédures administratives et obligations déclaratives

Remise obligatoire du certificat de travail temporaire

Le certificat de travail temporaire constitue un document administratif indispensable que l’ETT doit remettre au salarié à l’issue de chaque mission. Ce document atteste de la relation de travail, de la qualification professionnelle exercée et de la durée de la mission effectuée. Sa remise conditionne souvent l’accès du salarié à ses droits ultérieurs , notamment pour les demandes d’indemnisation chômage ou les démarches de recherche d’emploi.

Le certificat doit mentionner explicitement que le salarié est libre de tout engagement, formule juridique qui garantit sa liberté contractuelle pour de futures missions. L’absence de remise de ce document ou ses omissions peuvent engager la responsabilité de l’ETT et ouvrir droit à des dommages-intérêts pour le salarié lésé. Les entreprises de travail temporaire ont donc intérêt à mettre en place des procédures rigoureuses pour garantir la remise systématique et complète de ces certificats.

Attestation pôle emploi et calcul des droits au chômage

L’attestation employeur, communément appelée attestation Pôle emploi, doit être transmise directement par l’ETT à Pôle emploi dans un délai de cinq jours suivant la fin de mission. Ce document, désormais dématérialisé, contient l’ensemble des informations nécessaires au calcul des droits à l’allocation chômage : salaires perçus, motif de fin de contrat, périodes travaillées. Sa transmission conditionne l’ouverture ou la révision des droits du demandeur d’emploi.

Pour les intérimaires, le calcul des droits au chômage tient compte de la spécificité de leur parcours professionnel, souvent marqué par l’alternance de missions courtes et de périodes d’inactivité. La réforme de l’assurance chômage de 2019 a modifié les conditions d’ouverture des droits , exigeant désormais six mois d’affiliation sur les 24 derniers mois au lieu de quatre mois sur 28 mois précédemment. Cette évolution a particulièrement impacté les travailleurs temporaires, contraints d’intensifier leur activité pour maintenir leurs droits sociaux.

Déclaration sociale nominative (DSN) en fin de mission

La déclaration sociale nominative (DSN) de fin de contrat doit être effectuée par l’ETT au plus tard le cinquième jour du mois suivant la fin de mission. Cette déclaration, qui remplace l’ancienne attestation ASSEDIC, transmet automatiquement les informations aux organismes sociaux concernés : Pôle emploi, URSSAF, caisses de retraite. Elle constitue désormais le pivot de la protection sociale des salariés et conditionne l’ensemble de leurs droits.

La DSN de fin de contrat contient des informations détaillées sur la mission : dates de début et de fin, motif de rupture, rémunérations versées, cotisations prélevées. Sa transmission erronée ou tardive peut générer des dysfonctionnements dans les droits du salarié et exposer l’ETT à des pénalités administratives. La dématérialisation de cette procédure a considérablement simplifié les démarches tout en renforçant les obligations de précision et de célérité des employeurs.

Solde de tout compte et délai de rétractation légal

Le reçu pour solde de tout compte, document par lequel le salarié reconnaît avoir perçu l’intégralité des sommes qui lui sont dues, peut être établi par l’ETT en fin de mission. Ce document, non obligatoire mais recommandé, fait l’objet d’un formalisme strict : il doit être établi en double exemplaire, mentionner le détail des sommes versées et être signé par le salarié avec la mention « lu et approuvé » manuscrite.

Le salarié dispose d’un délai de rétractation de six mois pour contester ce reçu, période pendant laquelle il peut revendiquer des sommes complémentaires devant le conseil de prud’hommes. Passé ce délai, le reçu devient libératoire pour

l’employeur, sauf en cas de dol ou de violence. Cette sécurité juridique incite les ETT à être transparentes dans leurs calculs et encourage un dialogue constructif en cas de désaccord. La signature du reçu pour solde de tout compte reste néanmoins facultative et ne peut être imposée au salarié sous peine de nullité.

Gestion des fins de mission dans les secteurs d’activité spécialisés

Certains secteurs d’activité présentent des spécificités particulières dans la gestion des fins de mission temporaires. Le secteur du bâtiment et des travaux publics, qui représente environ 15% des missions d’intérim en France, bénéficie de dispositions particulières concernant l’indemnisation des intempéries. Les salariés intérimaires y ont droit aux mêmes indemnités que les salariés permanents en cas d’arrêt de travail pour cause climatique, sans condition d’ancienneté préalable.

Dans l’industrie agroalimentaire et les activités saisonnières, les accords de branche peuvent prévoir des modalités spécifiques d’indemnisation. Ces secteurs concentrent près de 25% des missions d’intérim et font l’objet d’une réglementation adaptée tenant compte de leurs cycles d’activité particuliers. Les fins de mission y sont souvent programmées en fonction des saisons, nécessitant une planification rigoureuse des obligations administratives.

Le secteur médical et paramédical connaît également des spécificités, notamment concernant la continuité des soins et les procédures de transmission entre professionnels. Les fins de mission dans ce domaine requièrent des protocoles particuliers pour assurer la sécurité des patients et le respect du secret médical. Ces contraintes influencent directement les modalités pratiques de cessation des missions temporaires et imposent aux ETT spécialisées une expertise sectorielle approfondie.

Contentieux et litiges liés aux fins de mission temporaires

Les litiges relatifs aux fins de mission temporaires représentent environ 8% des saisines des conseils de prud’hommes, selon les statistiques du ministère de la Justice. Les contestations portent principalement sur le calcul des indemnités de fin de mission, les conditions de rupture anticipée et le versement des sommes dues. La complexité du statut d’intérimaire génère parfois des incompréhensions entre les parties, nécessitant une intervention judiciaire pour trancher les différends.

Les principaux motifs de contentieux incluent la remise en cause du motif de fin de mission, particulièrement lorsque le salarié conteste le caractère fautif de son comportement ou revendique une embauche en CDI qui lui aurait été refusée à tort. Les délais de prescription, fixés à trois ans pour les actions en paiement de salaires et indemnités, constituent un enjeu majeur pour les salariés souhaitant faire valoir leurs droits rétroactivement.

La jurisprudence récente tend à renforcer la protection des salariés intérimaires, notamment concernant l’égalité de traitement avec les salariés permanents et l’application des conventions collectives.

Les tribunaux examinent avec attention les conditions concrètes d’exécution des missions pour déterminer si l’ETT a respecté ses obligations légales. Les condamnations peuvent porter sur des dommages-intérêts compensatoires, le versement d’indemnités impayées majorées d’intérêts, voire des sanctions pour discrimination ou harcèlement. Cette évolution jurisprudentielle incite les entreprises de travail temporaire à renforcer leurs procédures internes et leur formation des équipes opérationnelles.

Évolutions réglementaires et impact de la réforme du travail temporaire

La loi pour renforcer le dialogue social du 17 août 2015 a introduit des modifications significatives dans le régime du travail temporaire, notamment concernant la représentation du personnel et les accords d’entreprise. Ces évolutions impactent indirectement les conditions de fin de mission en renforçant les droits collectifs des salariés intérimaires. L’ordonnance travail de 2017 a également assoupli certaines règles tout en maintenant les protections essentielles des travailleurs temporaires.

La numérisation progressive des procédures administratives transforme les modalités pratiques de gestion des fins de mission. L’obligation de transmission dématérialisée des attestations employeur et la généralisation de la DSN simplifient les démarches tout en réduisant les délais de traitement. Cette modernisation bénéficie particulièrement aux salariés intérimaires, souvent confrontés à des enchaînements rapides de missions nécessitant une réactivité administrative maximale.

L’évolution du marché du travail vers plus de flexibilité et l’émergence de nouvelles formes d’emploi questionnent l’avenir du travail temporaire traditionnel. Le développement du portage salarial, des plateformes numériques de mise en relation et du travail en freelance crée une concurrence nouvelle pour les ETT classiques. Ces mutations pourraient conduire à une adaptation des règles encadrant les fins de mission temporaires, dans un souci de cohérence avec l’ensemble du droit du travail français.

Les négociations interprofessionnelles en cours portent notamment sur l’harmonisation des régimes d’indemnisation entre les différentes formes d’emploi précaire et l’amélioration de la sécurisation des parcours professionnels. Ces évolutions pourraient redéfinir les contours du travail temporaire et modifier substantiellement les droits attachés aux fins de mission, dans une logique de modernisation du marché de l’emploi français face aux défis économiques contemporains.